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Dans la peau d’un pirate – chapitre 3

La révélation sordide de Barbarroja

McKay arriva sur l’île à la nuit tombée. La lune se reflétait dans l’eau, faisant scintiller les gouttelettes d’argent sur la poupe du bateau. La silhouette du « From Soil to soul » se découpait dans la nuit comme une ombre chinoise à la lueur d’une bougie. McKay fit descendre ses hommes sur la plage et ordonna à une équipe de monter la garde devant les cales pleines, débordantes de trésors éblouissants et d’épices chatoyantes.

Il rassembla sa chemise sous sa nuque pour en constituer un coussin et s’assoupit sous la lueur froide de la lune. Sa nuit fut emplie de songes tumultueux et un chuchotement féminin aiguisé comme un éclat de verre. Il s’éveilla en sursaut lorsqu’il sentit un souffle chaud sur son épaule et une odeur de rose musquée mêlée à du bois de santal. En fermant les yeux, il voyait en négatif dans ses paupières les yeux en amandes de la reine et ses lèvres pincées, verrouillées par une malédiction.

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Le lendemain matin, les coffres furent transportés par son équipage, ficelés avec des cordes à même le dos des hommes pour déplacer leur poids écrasant. Ils s’enfonçaient lourdement à chaque pas dans le sable refroidit par la nuit de cette île mystérieuse. Deux hommes étaient partis en éclaireurs en direction du centre de l’île, où la végétation avait établi domicile. Ils pénétrèrent dans une forêt tropicale humide, ombragée par une canopée dense, se faufilant entre les orchidées, écrasant les mousses et les fougères. Ils mirent trois jours et trois nuits pour arriver sur un plateau au sommet de la végétation, qui surplombait l’île.

Un superbe château se trouvait au milieu du plateau, serti par des jardins bien entretenus et une esplanade spacieuse. Une grappe d’hommes et de femmes était rassemblée au pied d’un arbre, chuchotant et toisant les marins qui arrivaient les bras chargés. McKay arriva aux pieds de la bâtisse en contournant la fontaine de pierres blanches polies agrémentées de saphirs. Ce lieu semblait suspendu dans le temps, dans lequel les secondes auraient été enrichies de trésors inestimables.

McKay pénétra dans le bâtiment. Des serpents enlaçaient les immenses colonnades coloniales décorées de rubis et de diamants étincelants. Les frises des colonnes étaient surmontées de barrettes de saphirs. Un homme, à quatre pattes, décorait le contour des carrelages de marbre à la feuille d’or, avec un minuscule pinceau. Des pièces en trois ors purs étaient scellées aux murs.

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McKay et ses hommes s’avancèrent dans la longue allée, qui était bordée de pièces munies de divans rouges. Des hommes et de femmes de toute beauté y étaient allongés. Les murs suintaient une odeur douce, florale et légèrement âcre et les volutes d’opium embrumaient les pièces. Les regards des hommes semblaient vides, envoûtés, comme dépossédés. L’écho d’un chant mystique parvenaient aux oreilles des marins et leur fit instantanément penser aux mythes des sirènes qui peuplent les mers profondes.

Après plusieurs longues minutes de marche à travers ces visions irréelles au long de la galerie, ils virent se dessiner au fond de la pièce deux trônes gigantesques, l’un en platine en le second en or rose. Le dossier des deux assises était surmonté de pointes qui s’élevaient à un bon mètre de la fin du dossier, sculpté en un travail d’orfèvre et orné d’émeraudes et de diamants. McKay trébucha sur un fil d’or et de dentelle aussi fin que des ailes d’un papillon de nuit. En suivant ce fil des yeux, il s’aperçut que ce n’était nul autre que la traîne de la reine, qui se déployait à ses pieds sur plusieurs dizaines de mètres. Plus il s’approchait, plus le chant envoûtant résonnait au fond de ses tympans.

McKay s’approcha de ces deux souverains, qui étaient aussi immobiles que deux statues de marbre. Le cliquetis des pièces et des nombreuses pierres précieuses que lui et ses hommes apportaient s’entrechoquaient dans les coffres. Il aperçut d’abord les yeux de la reine, Des yeux gris argentés, changeants comme le ciel et l’océan avant l’orage, empreints d’une aura mystérieuse et intrigante. Sa beauté était aussi éclatante que celle d’une vague scintillante, éclairée par le soleil, déferlant avec majesté sur le rivage. Le bas de son visage était couvert d’un voile aussi fin et délicat qu’un cristal de glace. Les chants mystiques résonnaient de plus en plus fort, si fort que McKay ne savait dire s’ils étaient réels ou un fruit de son imagination.

« Ma reine » amorça McKay. « Accepte ces trésors, que je chéris depuis plusieurs années. Puissent ces joyaux éclairer ton visage et te rendre le plus radieux des sourires, ou conserve-les en gage de ma dévotion. »

Il fit un signe de la main à ses hommes, et quatre de ses marins s’approchèrent des trônes souverains et déposèrent aux pieds de la reine le coffre le plus précieux : celui de la mère de McKay. La reine se leva et inspecta le contenu du coffre d’un air sévère. Elle effleura de la main le bois d’acajou, plongea ses doigts dans les pièces d’or jaune, saisit délicatement les coupes d’argent et les fit tinter entres elles. Elle passa au milieu de tous les coffres, regardait attentivement le contenu tout en se laissant bercer par les effluves des épices et éblouir par les reflets étincelants de ces trésors.

Elle s’approcha de McKay et s’arrêta à quelques centimètres de son visage, le scrutant attentivement. Elle était si proche qu’il pouvait sentir un parfum délicat de patchouli et de figue de barbarie. Elle décrocha le voile qui recouvrait jusqu’alors le bas de son visage. Malgré sa beauté époustouflante et la finesse de ses traits, son visage restait de glace et sa bouche pincée. Aucun sourire ne se dessinait sur ses lèvres rouge carmin.

« Ce n’est pas assez. » Susurra-t-elle à McKay. « Reprends ton navire et trouve le trésor qui me satisfera ».

McKay reçut cette phrase comme un poignard acéré. Son souffle se fit court et une sensation d’engourdissement s’empara de ses membres. Tout à coup, une tension musculaire accrue figea sa nuque et son cou. Il sentit une colère noire le capturer. Elle grandissait, vibrante et assourdissante, à chacune des pulsations de son cœur. Il tourna les talons et sortit d’un pas raide du palais en direction de son navire. Il s’éloigna de ces murs, mais malgré la distance, le chant mystérieux et envoûtant ne quittait pas ses oreilles.

Les épices les plus douces lui semblaient amères. Les essences les plus subtiles avaient des notes rances. Le rhum avait un goût d’eau douce et l’éclat des pierres précieuses lui semblait terne. Il s’indignait de ses propres errances gustatives, et ponctuellement prenait un membre de son équipage au hasard et brandissait son épée sous son cou en hurlant, la main gauche chargée d’une épice brulante piochée au hasard :Taste it or pay the price ! Et si l’homme avait le malheur d’éternuer ou de grimacer, il le jetait à la mer.

Certains racontaient qu’ils apercevaient parfois McKay, déambulant sur le pont du navire comme s’il était ivre, marmonnant des phrases insensées et poussant des cris rauques et sauvages.

Depuis le jour de sa rencontre avec la reine, McKay ne fût plus le même homme. À la recherche du plus beau trésor qui pourrait satisfaire la reine, il était devenu le pirate le plus cruel et sanguinaire que la mer n’avait jamais porté. Il devint un être sombre, saisit d’une agressivité sans limite. Dans le monde maritime, il s’était forgé plus qu’une réputation : il était devenu une légende. On le redoutait, le craignait, et des contes sordides avec le nouveau nom de McKay étaient racontés aux enfants qui n’étaient pas sages. Pirates et habitants, corsaires et rois, riches héritiers et princesses, tous sentaient leur sang se glacer lorsque son nom était évoqué : Barbarroja.

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